dimanche 19 avril 2009

La ville est remplie de saisons


imageAnastasia Friedman

Rencontre avec Anastasia Friedman à propos de son album «Full Circle», pour Soundbeatmag

Habitué des lieux pratico-pratiques pour le déroulement d’une entrevue, je me dirige à pied depuis Jean Talon vers le Miss Villeray qui, comme son nom l’indique, est perdu dans le quartier du même nom. Et pourtant, en y entrant, un feu de cheminée bien agréable m’accueille. La tête de chevreuil qui trône au milieu de ce lounge où travaille parfoisAnastasia Friedman donne un sentiment de cocooning. Le lieu créé par des artistes est finalement parfaitement propice.

« J’ai décidé de créer des racines, une stabilité à Montréal », explique Anastasia Friedman. Des mots assez étonnants d’une artiste aux origines si variées. Anastasia est née de deux exilés à Montréal : une mère chilienne et un père new-yorkais. Son père, parti trop tôt, l’a en quelque sorte amenée vers la musique anglophone : « À 13 ans, j’avais besoin de retrouver mon père. J’ai suivi ses pas à travers la musique des Beatles et de Neil Young. » Un langage qui se ressent dans son dernier album Full Circle. Auparavant la chanteuse du groupe Sky, elle est partie en 2002 pour s’éloigner de la pop. Sa nouvelle voie lui semble donc naturelle : « J’ai toujours été une chanteuse folk. Je voulais m’identifier à mes parents et à leur vie dans les années 70. C’était une époque et un style de vie incroyable. »

Des racines pour voyager

Anastasia Friedman a visiblement suivi les traces d’une vie libre et ouverte : « Je suis allée en Indonésie et comme je n’avais pas d’argent pour retourner chez moi je suis partie en Australie pour y travailler. J’y suis finalement restée plus de temps que prévu. J’ai aussi fait la route du Mexique jusqu’au Panama. » Pourtant, Montréal est la seule ville qui lui permet de revivre cet état de perpétuel mouvement : « Je reviens toujours à Montréal. Peut-être grâce aux changements de saison. » Elle hait l’automne, mais préfère la fin de l’été, signe annonciateur d’une autre saison.

Pour oublier son envie de bouger, Full Circle donne un autre message : installez-vous, ne vous inquiétez pas, je vais rester, semble-t-il nous dire. Un sentiment qui se cristallise en concert, peu de gestes ou de paroles lui permettent de faire voyager son public. Les silences du Gesù avaient dû offrir une belle surprise à Ian Kelly le mois dernier, beaucoup plus stressé que sa première partie. « Je suis toujours nerveuse avant un spectacle, mais après je n’ai plus aucun stress. » confie-t-elle.

Pour le futur, Anastasia Friedman aimerait aller vers la spontanéité : « Dans cet album, on est plus allé vers le choix des instruments, vers quelque chose de plus cérébral. Pendant l’enregistrement, j’avais toujours hâte que ça sorte, mais on ne peut pas toujours penser à l’avenir. » Elle pense pourtant déjà à son prochain album : « J’aimerais faire quelque chose de plus heureux, moins nostalgique. Je vais essayer d’être moins gentille et plus directe. On a toujours tendance à se censurer pour ne pas faire peur. J’ai envie de me dépasser au niveau de la plume. On va voir si je réussis. »

Le cercle de son Full Circle, elle le fait aussi dans les langues qu’elles parlent couramment : le français, l’anglais et l’espagnol. Quand elle s’exprime, elle cherche ses mots, mais garde le charme des Montréalaises perdues dans la beauté du multiculturalisme ambiant : « Je tente de m’améliorer dans chaque langue, je ne veux pas que cela devienne une excuse ». Si elle a suivi des cours de guitare et de chant à Santiago tout en travaillant dans la plantation d’avocats familiale, Anastasia Friedman se considère plus comme une interprète. « Pour moi la guitare est plus un outil pour chanter », rappelle-t-elle. Espérons que Ian Kelly ait la bonne idée de la réinviter au Gesù pour sa date supplémentaire du 8 mai prochain.

Aucun commentaire: